risques pour la santé

POLLUTION ET SANTE

Lors d’une allocution pendant la manifestation du 23 mars 2024, Mme Vasseur, médecin, apporte des explications sur les risques sanitaires des rejets atmosphériques de l’usine Rockwool de Soissons.

A quoi faut-il s’attendre si l’usine Rockwool s’installe sur le plateau au-dessus de Soissons ?

Quelques chiffres nous sont donnés par l’enquête publique de 2020 :

814 tonnes de produits polluants sortiront des cheminées de l’usine en une année et viendront se promener sur les villages et la ville de Soissons. Certains sont légers comme les COV qui vont se diluer dans l’atmosphère et aller très loin. Et d’autres, plus lourds, finiront par retomber sur le sol comme les métaux.

La pollution tue plus que le tabac ou l’alcool. Selon une étude de l’institut politique et énergétique de Chicago, la pollution est la cause de 9 millions de morts prématurées dans le monde et par an, entre 50.000 et 90.000 en France selon les sources. Mais y-a-t-il autant de moyens mis pour lutter contre la pollution que contre le tabac ou l’alcool ? Bien sûr que non !

Ce sont pas moins de 28 polluants répertoriés, tous toxiques que nous allons respirer près de cette usine. Mais nous avons des CHAMPIONS, si cette industrie voit le jour elle sera la deuxième émettrice de PHENOL en France avec 38,3 t/an, la troisième de FORMALDEHYDE avec 21,5 t/an et la sixième en AMMONIAC avec 255,36t/an. Ces trois molécules sont irritantes, deux sont des cancérogènes avérés.

Un autre groupe particulièrement inquiétant est constitué par les perturbateurs endocriniens (108 tonnes/an) que sont les COV (composés organo-volatiles), les métaux et le formaldéhyde.

Le plus grand danger des perturbateurs endocriniens est leur toxicité dès la première molécule. Il n’y a pas de corrélation entre la dose et l’effet chez l’homme, avec un risque majoré chez la femme enceinte et l’enfant. Cela dépend de la durée d’exposition or cette usine produira 24h/24. Ces molécules dérèglent tout notre système hormonal et peuvent donc entraîner de nombreuses pathologies que nous allons voir plus loin.

Le groupe des métaux a la particularité d’être composé de molécules non dégradables et bio-accumulables, ce qui signifie qu’ils ne disparaissent pas de l’environnement une fois répandus. A cause de la pollution au plomb par l’industriel Metaleurop dans le Pas-de-Calais, des enfants ont été atteints de saturnisme. On trouve encore du plomb dans la cour de l’école voisine alors que l’usine a fermé en 2003.

D’autres polluants peuvent être retrouvés de façon assez commune dans les villes comme les particules fines et les oxydes d’azote ou bien le monoxyde de carbone et les oxydes de soufre émis par les chauffages et les moteurs. Le CO2 n’est pas comptabilisé parmi les polluants, c’est un gaz à effet de serre mais qui n’est pas toxique dans l’atmosphère.

Quels sont les problèmes avec ces polluants ?

En dehors de leur dangerosité propre, c’est la réglementation ! En effet les études de toxicité se font par principe actif et aucune étude n’est faite sur la toxicité des mélanges et des réactions chimiques que les produits peuvent avoir entre eux, créant parfois de nouvelles combinaisons encore plus toxiques que les produits initiaux. C’est pourquoi le principe de précaution devrait s’appliquer quand plusieurs produits chimiques toxiques sont mélangés, ce qui n’est pas le cas actuellement.

Quels sont les effets sur la santé de tous ces polluants ?

Hé bien les difficultés commencent dès la conception :

En effet l’être humain a de plus en plus de difficultés à se reproduire , on estime entre un couple sur quatre et un sur huit en difficulté pour avoir des enfants (selon l’INSERM et la ministre de la famille). Le nombre de spermatozoïdes a diminué de moitié en cinquante ans chez les hommes dans le monde, les recherches pour en trouver les causes sont en cours mais les perturbateurs endocriniens sont fortement soupçonnés.

Le moment crucial de l’avenir de nos enfants se joue pendant la grossesse. Cette période de formation de tous les organes est soumise au code génétique et aux régulations hormonales.

Les perturbateurs endocriniens sont pendant cette période responsables de nombreuses malformations notamment sur le système reproducteur et des atteintes du développement du cerveau. Ces malformations peuvent se transmettre sur plusieurs générations par le phénomène de l’épigénétique.

Pendant la petite enfance et l’âge des apprentissages, l’atteinte du cerveau se découvre et les troubles du développement apparaissent avec toute la série des troubles des apprentissages : dyslexie, dyspraxie, dyscalculie, troubles du langage mais aussi les retards intellectuels, les troubles autistiques ou le trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité (le TDAH).

Chez les plus grands et les adolescents, les polluants irritants comme l’ammoniac, les particules fines, le phénol, le formaldéhyde et les COV vont entraîner des inflammations. Cela se traduit directement par des irritations des yeux, du nez, de la gorge et des voies respiratoires, de la peau, mais aussi par une inflammation chronique qui va aggraver toutes les pathologies respiratoires et en provoquer d’autres, comme certaines leucémies.

Une étude récente de Santé publique France révèle que 30.000 cas d’asthme par an dans les écoles sont dus au formaldéhyde et aux champignons.

Les maladies métaboliques dues aux perturbateurs endocriniens vont se révéler à ce moment-là et nous voyons augmenter le taux d’obésité chez l’enfant qui est passé de 3 % en 1965 à 16 % en 2000 (selon Santé publique France ). L’incidence du diabète chez les enfants augmente de 4,5% par an et l’âge de début diminue. Les troubles sexuels apparaissent comme la puberté précoce et les troubles des règles et de la spermatogénèse.

Les oxydes d’azote (151,2 t/an) ainsi que les particules fines (173,37t/an) et les oxydes de soufre (73,5 t/an) sont produits par les combustions. Chez l’adulte, ils vont provoquer des infarctus et des maladies cardio-vasculaires. Chez l’enfant, ils vont aggraver les maladies respiratoires.

Enfin de nombreux polluants vont favoriser l’apparition de cancers, notamment le formaldéhyde, l’acide chlorhydrique et les métaux surtout le cadmium, le chrome et le plomb.

Environ 2500 enfants de moins de 18 ans dont 50 % de moins de 5 ans (INC 2022) sont atteints de cancer chaque année. L’augmentation du nombre de cancers chez l’enfant est très nette avec 1 % d’augmentation par an principalement des leucémies et des lymphomes suivis par les tumeurs du cerveau.

Les causes ne sont pas identifiées d’après les agences scientifiques mais pour Jean François Corty vice président de Médecins du monde, 90 % des cancers de l’enfant seraient d’origine environnementale.

Alors, que fait-on vis-à-vis de ces catastrophes annoncées ?

Hé bien, nos dirigeants ont des idées mais faute de proposer des actions concrètes, ils font des plans :

1) Dans la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens de 2021, on nous dit tout sur les pathologies, l’absence d’effet dose, les mécanismes, l’effet cocktail et où on les trouve. Mais le gros problème est, d’après le ministère, la réglementation qui doit être améliorée car elle est inexistante. Il n’y a pas, à l’heure actuelle, d’évaluation des substances chimiques mises sur le marché quant à leurs effets sur le système endocrinien.

2) Dans la nouvelle planification écologique de 2023, les seuls pollutions industrielles évoquées sont les oxydes de soufre et les oxydes d’azote, pas de plan pour le reste.

3) Dans «les mille premiers jours», le rapport gouvernemental d’une commission d’experts sur la période qui s’étend de la conception aux trois ans de l’enfant paru en 2020, une malheureuse demie-page sur 45 pour évoquer l’environnement de l’enfant et les toxicités auxquelles il pourrait être exposé. Dans la partie des conseils aux parents, on retrouve : l’aération des locaux, le manger bio, la composition chimiques des produits ménagers ou cosmétiques, c’est-à-dire une toute petite partie des expositions chimiques, notamment celles de l’extérieur.

4) Le comble c’est sûrement la stratégie nationale sur les troubles du neuro-développement qui présente 81 mesures pour lutter contre les troubles dys, le trouble de l’attention avec l’hyperactivité, l’autisme, les déficiences intellectuelles, etc. Le premier engagement consiste à rechercher les causes de ces troubles et pour cela la création d’une cohorte dite Marianne, c’est-à-dire un échantillon de population qui sera observé de la grossesse à la fin de l’enfance. Donc, nous aurons les résultats dans quinze ans !

Conclusion

En conclusion, il y a trois choses à retenir :

1) les pouvoirs publics ne prennent pas le problème de la pollution à sa juste importance. C’est pourtant un enjeu majeur pour la santé publique des prochaines années.

2) en ce qui concerne les perturbateurs endocriniens, la dose n’a pas d’importance, c’est la période d’exposition qui compte. Un cerveau malformé pendant la grossesse le sera à vie.

3) la seule façon de faire cesser l’hécatombe est de tarir les sources, actuellement on colmate les dégâts. On ne pourra jamais vider la baignoire à la petite cuillère sans fermer le robinet.

Je tiens à signaler une initiative locale intéressante : la commune de Courmelles envisage de signer la charte des territoires sans perturbateurs endocriniens. Je ne peux que féliciter le conseil municipal et l’encourager à poursuivre dans cette voie.

1 réflexion au sujet de “POLLUTION ET SANTE”

  1. Manifester à l’échelle locale est une chose.

    Les cartes présentées avec les conséquences des pollutions « xyz » mises l’une sur l’autre montre une impact complète de l’ensemble des territoires !

    Divulguons, informons auprès de l’ensemble des populations.

    Battons nous ! Le hic : être suffisamment costaud juridiquement et pas seulement.

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