Dans un article publié le 22 mars 2024 dans le journal l’Union en pages d’infos locales, le chef de projet de Rockwool Soissons revient sur les arguments de l’association Stop Rock Wool. Il se veut rassurant que ce soit sur les rejets de polluants atmosphériques, sur les consommations d’eau ou sur les consommations énergétiques. Voici quelques éléments de réflexion sur les sujets évoqués.
Polluants atmosphériques
Des polluants atmosphériques, M Saillard ne retient que le formaldéhyde et promet la mise en place d’une station de mesure de la qualité de l’air. Or, cette promesse était déjà mentionnée dans le rapport de Rockwool à l’issue de l’enquête publique et elle n’a jamais été mise en application. Comment pourront-ils alors comparer la qualité de l’air avant et après la construction de l’usine ? Selon un document d’Atmo France joint à l’enquête publique, il n’y a pas de valeur limite pour le formaldéhyde pour l’air extérieur. Cependant, il s’agit d’un perturbateur endocrinien et on sait aujourd’hui que les perturbateurs endocriniens ont des effets déjà à de très faibles doses sur les femmes enceintes et les enfants. A ce sujet la règlementation est malheureusement très en retard. Le ministère de la transition écologique le reconnaît lui-même.
Consommations d’eau
Sur le sujet de la consommation d’eau, M Saillard affirme dans cet article que la consommation sera de 5 m3/h en moyenne. Cette affirmation est en contradiction avec les données des documents fournis pour l’enquête publique. En particulier, le document B01 indique que les consommations d’eau peuvent atteindre 20 m³/h dont la moitié prise sur le réseau d’eau potable selon un schéma lisible en page 7.
Or, dans un courrier adressé à la commune de Courmelles, le syndicat des eaux du Soissonnais précise que le débit théorique du réseau est de 20 à 30 m3/h. Et, sans connaitre les besoins des autres usagers de la zone du plateau actuels et futurs, le syndicat affirme pourtant que le projet est compatible avec les capacités du réseau.
En ce qui concerne la récupération des eaux pluviales, Rockwool construit ses calculs sur une moyenne annuelle et sur une période antérieure à 2010. En se basant sur un calcul mensuel et sur la pluviométrie des périodes récentes, les associations opposées (association Stop Rock Wool, Picardie Nature, Sauvons Soissons, Globe21) ont démontré qu’il y aura un déficit de consommation qui obligera l’industriel à puiser sur le réseau public. Lorsqu’elle sera en fonctionnement, l’usine ne pourra pas être arrêtée, elle sera donc prioritaire, au détriment d’autres usagers du réseau. Monsieur Saillard affirme aussi qu’il peut arrêter son four électrique alors que nous savons très bien que ce n’est pas possible.
Les consommations d’eau constatées à Saint-Eloy-les-Mines sont l’objet de remarques régulières au conseil municipal et lors de la commission de suivi de site. L’usine de Saint-Eloy est reliée à une source naturelle d’eau avec de nombreuses difficultés. Or, sur le plateau de Courmelles, il n’y a aucune source naturelle d’eau pour pallier les excès de consommation de l’usine. Les consommations annuelles à Saint-Eloy-les-Mines ont été de 269.350 m³ en 2020. Ces consommations servent essentiellement au refroidissement lors du process. Rapportées au tonnage produit, cela donnerait à Soissons une consommation supérieure à la moyenne de 11 m3/h indiquée dans le document B01. Précisons encore qu’à Saint-Eloy-les-Mines, Rockwool bénéficie d’un réservoir naturel de 245.000 m³ à comparer au 7.120 m³ du bassin de rétention des eaux pluviales prévu à Soissons.
De plus, dans sa réponse au tribunal administratif, Rockwool affirme qu’elle pourrait prélever jusqu’à 100 % de ses besoins sur le réseau public en période de sécheresse. Il en résulte que la tension sur le réseau public d’eau potable serait extrême en période de sécheresse car si Rockwool prélève 100 % de ces besoins, cela représenterait de 70 à 100 % des capacités du réseau.
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Consommations énergétiques et décarbonation
Concernant l’électricité, M Saillard reprend le mantra de Rockwool qui prétend que le four électrique permet de décarboner la production. On ne lit plus l’affirmation que l’isolant permet d’économiser 100 fois l’énergie de fabrication, c’est une avancée.
A Soissons, la consommation annuelle sera de 192 GWh soit 1,669 Mwh/ tonne de produit fini. Si on compare encore une fois avec la consommation énergétique à Saint-Eloy, un rapport d’inspection de la DREAL indique en 2019 que la consommation de l’usine est de 2,102 Mwh/tonne avec cette précision : « la difficulté à atteindre l’objectif global de réduction des consommations de 3 % s’explique notamment par la fabrication de nouveaux produits plus énergivores… (nouveaux produits nécessitant plus de cuisson et de plus hautes températures de process). » Ces nouveaux produits sont les isolants denses utilisés pour l’isolation thermique par l’extérieur. Il y a donc un risque que la consommation estimée soit sous-évaluée.
Mais approfondissons le sujet des émissions de carbone. Le calcul d’émissions de 22.284 tonne/an est effectué sur le gaz, la dolomie, les déchets, les électrodes et la chaux. Rockwool omet le CO2 intrinsèque du four électrique. Il omet les émissions de carbone des transports or le site étant isolé, il ne sera alimenté que par des transports routiers. Ce point a été confirmé par Rockwool dans un mémoire en réponse au Tribunal administratif : les matières premières seront acheminées par la route depuis des sites parfois éloignés de centaines de kilomètres. Il omet enfin le CO2 intrinsèque de l’énergie électrique car l’électricité n’est pas une énergie décarbonée.
Mais en intégrant ces différentes émissions de CO2, Rockwool passerait dans une autre catégorie d’émetteur de CO2 au sens de la législation européenne sur les émissions de gaz à effet de serre. Ce qui pourrait remettre en cause tout le processus d’autorisation.
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